Culte
Publié le 31/01/2008 à 12:00 par houseofgeeks
Le 13 novembre 2007, sont parus les deux derniers tomes des aventures du plus charismatique des amnésiques du 9ème art, XIII. Albums n°18 « la version irlandaise » dessiné par Jean « Moebius » Giraud et n°19 « le dernier round » qui mettent un terme à ses pérégrinations.
Et il faut bien l'avouer, il était temps que cela se termine !
Victime de son succès
Parue pour la première fois en 1984, XIII connaît un grand succès et devient au fur et à mesure des albums un best seller de la bande dessinée. La série bénéficie du fait d'être l'une des premières à avoir introduit le thème de l'espionnage dans le neuvième art. Il s'agit de plus d'une saga à suivre, contrairement à l'autre grande série populaire du même scénariste, Largo Winch. Cet étalement sur la durée permet à Van Hamme de développer une intrigue complexe mais lisible, aux multiples rebondissements. Le dessin, réaliste et sobre, est très accessible.
Les premiers albums, qui sortent au rythme soutenu d'un par an, connaissent un succès croissant, essentiellement grâce au bouche à oreille. En 1990, après la première année sans XIII, deux albums (« le dossier Jason Fly » et « la nuit du 3 août ») sortent à quelques mois d'écart, soutenus par une importante campagne publicitaire qui ouvre à la série les portes de la grande distribution. Pour l'album suivant « XIII contre un », l’éditeur produit même un spot de huit secondes pour le cinéma, une première dans l'histoire de la bande dessinée, qui propulsera l'album à plus de 175 000 exemplaires vendus. XIII marque le premier mariage à grande échelle entre BD et marketing : peu avant la sortie de chaque nouvel album, les premières planches sont publiées dans différents journaux. Des accords sont passés avec la Française des jeux, avec des éditeurs de jeux vidéos et de jeux de société et XIII est décliné sous tous les angles possibles. La série est devenue un produit dont on crée le besoin grâce à une promo abondante et savamment orchestrée. Ultime accroche, la mention culte est de fait accolée. Pris au propre piège de sa réussite, la série au départ si ambitieuse se mue en une entreprise commerciale de luxe. L’attente de lecteurs de plus en plus nombreux est telle que Van Hamme bâcle ses scénarios qui ne sont plus que des prétextes à de l’action échevelée et des retournements parfois assez rocambolesques. La série demeure plaisante à lire mais dans l’opération, a perdu son âme.
Le fil rouge, soit la recherche désespérée de son identité, a conduit notre numéro fétiche dans une spirale mémorielle qui pris sur la fin des proportions inflationniste : d'un album à l'autre (parfois dans le même) son identité changeait au gré des rebondissements scénaristiques afin de relancer la machine et donc l'intérêt des lecteurs. Qui est vraiment XIII ? C'est là la question à laquelle répond le dernier album. Mais est-ce si important de connaître sa véritable identité ? Pas vraiment, car le plus intéressant dans cette série était justement le parcours alambiqué et torturé de Jason Mac Lane pour tenter de lever le voile sur son passé.
Et c'était véritablement sa capacité de raisonnement et de réaction pour se sortir des embrouilles qui étaient le moteur de l'intrigue. Seulement, à partir du moment où la conspiration fut conjurée et le numéro I démasqué (dans l'excellent album « Le jugement »), XIII devint de plus en plus passif pour peu à peu disparaître du premier plan au bénéfice de tous les personnages secondaires gravitant autour de lui. Devenant plus une présence fantomatique hantant les albums. C'est bien simple, ce sont ses amis les plus intéressés par la découverte de la « vérité ». C’est également dans cet album charnière que disparaît « la mangouste », LE méchant de la série. Tueur responsable de l’amnésie de notre héros – exécution ratée – il tentera par tous les moyens de réparer son erreur. Deux êtres inextricablement liés par le destin, le créateur face à sa « créature ». Le complot mis à jour et son « chien de garde » mis hors d’état de nuire, la série perd son principal ressort dramatique. Reste la quête de XIII, découvrir qui il est. Mais le cœur n’y est plus.
Sans doute par peur de lasser mais plus prosaïquement pour attirer de nouveaux lecteurs (la série dure depuis 1984 quand même), une nouvelle orientation fut donc donnée. Un peu ce que les comics ont l'habitude de faire régulièrement, relancer une série en repartant sur de nouvelles bases. Mais on peut aussi rapprocher « XII » de la série « Twin peaks ». Bien que formellement différentes, Lynch et Van Hamme avaient dans l'idée de faire une série au mystère perpétuel. Ils sont plus intéressés par ce qu'il révèle que par sa résolution. Si nous avons fini par connaître le nom de l'assassin de Laura Palmer, c'est bien à cause des pressions de la chaîne. De même que ce fut une décision éditoriale de stopper en pleine gloire, avant un essoufflement des ventes et une lassitude des lecteurs. Une manière d'assurer une rentabilité maximale sur une série devenue objet de culte : jeu à gratter, promo à grande échelle à chaque nouvel album, jeu vidéo...Et bientôt, adaptation live (voir article suivant).
L’Histoire sans fin
Lorsque Lynch dévoila l'identité du meurtrier, il s'ensuivit dans la seconde partie de « Twin peaks » une exploration aussi passionnante des coulisses du mal à l'oeuvre dans cette ville. Ce que ne réussit pas complètement la saga XIII dans son exploration du passé morcelé de notre héros. Mais ce qui fit le plus grand mal a été la disparition du tueur à gage « la mangouste ». Un vieillard aussi retors, intelligent et impitoyable qui donna bien du mal à l’homme dans la force de l’âge surnommé numéro XIII. Une fois encore, l'adage qui veut que la réussite de toute oeuvre de fiction tienne dans la fascination pour le bad guy se vérifie. Le charisme et l'ambiguïté de « la mangouste » en font une des figures du mal les plus réussies, aussi mythique que peut l'être Dark Vador. Surtout, il était le parfait contre-point de XIII, aussi déterminé à le tuer que l'autre était déterminé à faire la lumière sur ce qu'il lui était arrivé.
Mais le véritable intérêt de la série et le génie de Van Hamme est d'avoir fait de son personnage une quasi feuille blanche sur laquelle se réécrivait son histoire, elle même intrinsèquement liée aux plus grands évènements historiques des États-Unis puisque le premier album (« le jour du soleil noir ») le présente tout de même comme l'assassin du président américain Walter Shéridan. Avec cette série, le véritable propos de Van Hamme est de revisiter l'Histoire de ce pays hanté par ses « démons » : assassinat de JFK, révolution en Amérique latine, mafia, CIA, Ku Klux Klan, le maccarthysme, etc… Le tout, articulé autour d'une intrigue tournant autour d'un complot qui permet de donner forme aux peurs les plus abstraites, paranoïa et origine cachée. C’est ce qui a contribué à son succès, la série s’ingéniant à trouver une explication à ce qui se révèle être une conjonction d'évènements comme à l'éternelle question « Qui suis-je ?».
Horizon vers qui tous les fils narratifs convergent, l'identité de XIII est un Mc Guffin (1) moderne, ni plus ni moins.
Et c'est la popularité croissante de la série qui précipita son arrêt. Par peur d'une désaffection si le mystère demeurait trop longtemps entretenu. Surtout, l'objet de toutes les attentions s'était reporté sur la possibilité donnée ou non à XIII de lever enfin le voile sur tout son passé. On l'a dit, Van Hamme était plus intéressé dans l'exploration de toutes les pistes narratives possibles que dans la révélation. La renommée acquise étant devenu un carcan à son imagination, et pour éviter de perdre les lecteurs, les derniers albums voyaient leurs intrigues tellement diluées qu'au final elles ne racontaient plus rien. Il était temps d'y mettre un terme.
Donc, à la fin de l'histoire, XIII sait qui il est. Ou plutôt il connaît son véritable nom et sait qui il n'est pas. Autrement dit, il doit se reconstruire en repartant presque de zéro. Une deuxième chance sans pareille que par analogie on peut considérer comme une seconde naissance. D'ailleurs, le major Jones (très belle black et petite amie de notre héros) l'a compris dès le départ, refusant de l'appeler autrement que par le nombre porte bonheur, le fameux XIII.
(1) Un McGuffin est un néologisme hitchcockien. C’est un objet qui ne sert qu’à faire agir l’acteur : la recherche de documents, un verre de lait, tout ce qui fait bouger, réagir, vivre le personnage et qui n’a aucune autre utilité que d’accroître le suspens (éventuellement).
Il déclare à Truffaut : « C’est extrêmement important pour les personnages du film, mais sans aucune importance pour moi, le narrateur. »
Le McGuffin ne veut rien dire, ne représente rien. Le nom même est créé pour faire parler les bavards, et imaginer les plus folles théories. Il a une consonnance écossaise, et pourrait être n’importe quoi, tant que c’est absurde.
Voici comment Hitch raconte l'origine du terme :"Deux voyageurs se trouvent dans un train en Angleterre. L'un dit à l'autre : "- Excusez-moi Monsieur, mais qu'est-ce que ce paquet à l'aspect bizarre qui se trouve au-dessus de votre tête?
- Oh c'est un McGuffin.
- A quoi cela sert-il?
- Cela sert à piéger les lions dans les montagnes d'Ecosse.
- Mais il n'y a pas de lions dans les montagnes d'Ecosse.
- Alors il n'y a pas de McGuffin."
Evidemment l'anecdote est surtout faîte pour faire parler les bavards...et pour répondre à ceux qui voulaient une vraie réponse.
Publié le 14/01/2008 à 12:00 par houseofgeeks
Désolé, on ne va pas parler cul. Bien que la fin de cet article risque fort de vous procurer une petite jouissance aussi intense qu'impromptue !
Nu Image Films est une société de production américaine, fondée en 1992 par l'israélien Avi Lerner, ancien de la Cannon : elle s'est illustrée par un rythme de production très soutenu (15 à 18 films par an) et par des méthodes de tournage à l'économie qui lui permettent d'engranger un maximum de bénéfices sur le marché des séries B (voire pire)destinées au marché de la vidéo. Des apôtres de la méthode Corman, donc.
Nu Image est connue et reconnue pour son opportunisme limite indécent. « Cyborg Cop » (1993) et sa suite (1995) lorgnant bien évidemment du côté de « Terminato »r et de « Future Cop » avec ce bon JCVD, mais aussi « The peacekeeper » (1997) qui lui louche vers le « peacemaker » de Mimi Ledder avec le beau Georges « what else ?» Clooney (sorti la même année) ou encore cet « Alien versus Alien » sorti en 2007 et qui rappelle furieusement un film dont j'ai oublié le titre...
Une société grandement appréciée également pour sa contribution dans le dur combat de protection d'espèces menacées, on se demande bien pourquoi. Ainsi, avons-nous eu droit à la saga dite des « films d'agressions animales » : la série des « Shark Attack », « Shark in Venice » (voir Venise et mourir...bouffé par un squale !), « Spiders » (nos amies à huit pattes), « Crocodile » et autre « Octopus ». Une saga qui à elle seule aura animée l'année 2000, tous ces films étant produit en quelques mois. Un rendement à faire rougir de plaisir le Sarkozy qui sommeille en nous...
N'oublions pas leur contribution au non moins difficile combat de réhabilitation de gloires passées. Un travail de restauration remarquable puisque célébré dans des films de guerre patriotiques "Air Strike" ou « Opération Delta Force » de Sam Firstenberg (le culte et excellent « American warrior 2 », c’est lui !), et autres films d'action. Avec de vrais morceaux de Steven Seagal ("Piège en Eaux Profondes"), de Jean-Claude Van Damme (« In Hell ») ou de Lundgren (« Detention ») dedans !
Depuis 1999, Nu Image possède d'importants studios en Bulgarie, où sont délocalisés l'essentiel de ses tournages, qu'il s'agisse de reconstituer l'Amérique du sud ou le Pôle nord. Trop forts, les p'tits gars quand même.
Le nom de la compagnie étant connoté "série B", c'est via sa filiale Millenium Films que Nu Image produit des oeuvres plus ambitieuses. Parce que la déconne ça va bien un moment.
Quoique avec « le dahlia noir » de De Palma, « 88 minutes » de Jon Avnett ou « 16 blocks » de Richard Donner on peut se poser la question du sérieux de la démarche.
Une filiale qui se paye le luxe de produire le prochain film de Sly Stalone. Oui, oui carrément le furieux et barbare « John Rambo », en salles début février.
Si je vous parle de ces quelques productions (145 au total à ce jour quand même), c'est bien parce qu'elles méritent d'être découvertes. Non, là je ne rigole pas. Car c'est Nu image qui via cette filiale a acquis les droits du revival de « Conan ». Projet fantasme de nombreux fans et autres geeks un tant soit peu cinéphiles, prévu pour 2009. Mais surtout, un projet auquel est rattaché Gérard « Léonidas forever » Buttler et un certain John Mc Tiernan !
Oui, je vous avais prévenus, c’est le genre d'association qui vous donne une gaule de tous les diables !...
Alors, quand vous irez faire les courses au supermarché le samedi matin, jetez un oeil au bac des DVD à 4,99 €, dans le lot il y aura sûrement un petit Nu Image qui traîne. En l'achetant, vous pourrez fièrement déclarer : « J'ai participé au financement du « Conan » de Mc T. ! »
Publié le 01/12/2007 à 12:00 par houseofgeeks
Alors qu'un remake de "Escape from New-York" est en projet (Mostow à la réalisation en lieu et place de Ratner, c'est déjà ça de gagné) réhabilitons un des chefs-d'oeuvre de Big John (Carpenter), "Los Angeles 2013".
Suite 16 ans après de "New-York 1997". Mais je préfère le titre original à savoir "Escape from New-York" et donc celui qui nous intéresse "Escape from Los Angeles".
Déjà, le titre annonce la couleur. On va avoir droit à une variation sur le même thème, c'est à dire que le héros (rebelle) est forcé par les autorités de pénétrer une ville et d'en ressortir avec un élément déterminant pour eux. Seul le lieu d'action et l'élément en question changent.
Comme dans un jeu vidéo.
En cela, on peut parler de série des "Escape from..." seul le nom de la ville pouvant changer à loisir (L.A, Boston, Bagdad, Chaumont...)
Souvenez-vous du générique d' "escape from N.Y" où les bâtiments étaient modélisés par ordinateur. Une présentation reprise telle quelle pour l'introduction du jeu vidéo sorti à l'époque.
Et suivait ce générique, un texte présentant la situation, les enjeux.
Donc " Escape from L.A" reprend le personnage de Snake Plisken chargé de reprendre un procédé capable d'anéantir toute forme d'énergie, tombé aux mains de rebelles. Si le système était mis en route, cela signifierait la fin de la civilisation et le retour à l'âge de pierre !
Enjeu énorme mais qui ne motivera que de loin l'action du film. Mais on y reviendra tout de même à la fin qui elle est hénaurme et subversive à souhait.
Ce film s'est fait grâce à l'argent de studio commandant une suite pour commémorer la sortie du premier opus (ils ont osé commander quelquechose au maître !). Espérant ainsi capitaliser un max. Mais ce fut un four complet tant public que critique. Normal avec Big John Daddy, éternel incompris dans son pays d'origine.
Pourquoi a-t'il été aussi mal perçu ? C'était pourtant la reprise exacte du premier .
Pas tout à fait.
Parce que si le déroulement du film est conforme au premier (arrivée dans les locaux de la police, briefing, arrivée dans la ville, etc...) les péripéties changeant quelque peu, le traitement du héros (plutôt de l'anti-héros) est totalement différent.
"Escape from N.Y " a permis de faire de Plisken une icône du film de S.F, dans sa suite Carpenter déstructure complètement ce mythe.
Non, je dirais plutôt qu'il l'émancipe. En clair, Snake s'affranchit de son créateur !
Alors, Snake Plisken premier héros virtuel doué de raison ? Oui. Et je le prouve.
Le premier de la série nous présentait un personnage d'anti-héros révolutionnaire, Snake Plisken, devenu grâce à ce film une icône de la S.F.
La suite se pose comme une extension au premier. Si le déroulement s'avère identique, seul un budget plus conséquent permet à Carpenter de proposer un traitement plus spectaculaire. Que se soit, les costumes, les décors,etc, tout y est magnifié.
Sauf que le personnage de Snake est ici ouvertement présenté comme un personnage de jeu vidéo à qui l'on demande de revenir pour une nouvelle mission. Voir à ce titre son entrée en scène au début du film. Il est transporté dans un fourgon jusqu'au Q.G de la police. Il est assis dans le noir. Soudain, les portes s'ouvrent, créant un cadre dans le cadre. Plisken se lève et s'avance. On est dans son dos et on le voit avancer vers l'ouverture au fond de l'écran. Une fois passé les portes du fourgon, il apparaît plus grand que dans le fourgon. Ou "bigger than life". Autrement dit, le passage du cadre créé par les portes le fait entrer de plein pied dans la fiction et donc le transforme en une figure encore plus héroïque.
C'est un peu théorique mais pour mieux comprendre, revoyez cette scène.
A partir de ce moment là, il va se plier bon gré mal gré aux nouvelles péripéties concoctées par son créateur et se conformer au comportement que l'on attend de lui.
Une scène révèle bien le rapport de Snake avec la fiction auquel il participe, c'est celle où il doit réussir un certain nombre de paniers de basket en un temps record. Une fois que l'épreuve lui a été présentée, arrive de nulle part un ballon de basket. Qui lui a lancé sinon la personne qui se trouve hors champ ; le réalisateur. Pour l'instant il accepte de se prêter au jeu bien qu'il ne se fasse aucune illusion sur son issue, sa victoire est acquise dans le fait même que c'est lui le "héros". En effet, il ne se dégage aucune émotion lorsqu'il réussi l'épreuve à la dernière seconde. Il est sûr de lui. Ou plutôt de son statut.
Précedemment, j'avais esquissé le fait que Snake s'affranchissait de son statut de personnage de fiction. Cette rébellion commence lorsqu'au détour d'une scène, Snake s'arrête et s'assoit ! Il n'y a rien qui justifie qu'il s'arrête d'un coup alors qu'il a une mission à accomplir !
Mais sa véritable émancipation intervient dans le dernier quart d'heure. Donc Snake a réussi à s'emparer du dispositif permettant de paralyser la production d'énergie de la planète. Et c'est pas un hasard si c'est une télécommande qui permet à Snake d'éteindre toutes les lumières (donc toutes sources productrices d'images). Il a compris le pouvoir des images et en a marre de faire les frais de leur manipulation, d'en être prisonnier. Donc il éteint tout, quitte à précipiter le retour à l'âge des (de la ?) cavernes !
Mais sa liberté est incomplète tant qu'il n'a pas démasqué le véritable responsable de ses "malheurs", Carpenter lui-même.
Et il le fait dans une scène anthologique où Snake se tourne vers la caméra et regarde de face en s'adressant un dernière fois à nous et par extension à Carpenter !
Le "regard caméra" est à proscrire pour maintenir l'illusion de la fiction. Le fait de regarder l'objectif de face provoque une mise en abyme de la fiction. Snake a pris conscience qu'on le regardait. Il a pris conscience de son statut de personnage fictif.
Voilà donc un film complètement subversif et qui amène en plus une réflexion sur les images et sur le cinéma de son auteur. Un vrai chef-d'oeuvre mésestimé.
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Publié le 23/11/2007 à 12:00 par houseofgeeks
Voilà un film qui a subi l'opprobre d'une bonne partie des critiques à cause de deux scènes chocs.
Franchement, laissez lui une chance et regardez le, en entier.
Ce n'est en aucun cas un film fait dans le but de choquer les bien pensants à tout prix. C'est au contraire un film bien pensé et qui relate surtout de l'inutilité de la vengeance, de la fragilité du bonheur et de l'amour comme seul réconfort.
Vous avez dû entendre parler de sa structure inhabituelle puisque débutant par "la fin". C'est un parti pris finalement très logique et non pas stylistique. Cela permet à Noé d'étayer son propos et de montrer que la vengeance ne sert à rien puisque ne ramènera pas ce qui était.
Surtout, la vengeance ne conclut pas le film comme si la violence coulait de source. Au contraire, elle n'est que le manifeste ponctuel d'un chaos organique et humain, en rien un apaisement. A ce titre, fort bien illustré par les mouvements épileptiques d'une caméra prise de convulsions. Une façon d'"imager" les sentiments ressentis par les protagonistes (confusion, chaos, colère, haine...).
Noé démontre qu'une justice basée sur un sentiment de vengeance est dangereuse, la niant en tant que fin en soi puisque niée en tant que fin narrative.
Reste les moments apaisants, beaux, où un sentiment d'amour prédomine. L'amour comme ultime souvenir qui a brutalement, irréversiblement, dégénéré.
Même si le pire est arrivé, ce qui était beau prédominera toujours. Ne serait ce qu'en l'état de reproduction mentale. Et même si dans les souvenirs les images s'effacent, il reste toujours la perception du sentiment de bien être et de bonheur alors ressenti.
Le temps détruit tout, certes, mais il n'efface rien.
Il est vrai que sortie du contexte du film, on peut s’interroger sur la volonté du réalisateur. Choquer pour choquer ? Une manière de dire, serez-vous capable de rester jusqu’au bout ? Je ne pense pas. S’il nous renvoie notre voyeurisme en pleine face (Vous aimez mater, hein ? Régalez-vous !), c’est en servant le scénario, la structure décomposée du récit.
C’est clair que le malaise, il le fait bien passer ; faisant de nous les premiers témoins, incapables de réagir ou ne le voulant pas. C’est de notre attitude que vient le malaise et pas seulement de la scène en elle-même. Une scène qui est le pivot du film, puisque les évènements expliqués en amont renforcent nos sentiments de compassion, de tristesse, d’impuissance.
Car tout le film illustre une chose, la fragilité du bonheur, de la vie, de l’existence. Un geste, une parole non dite, peut tout faire basculer. Mais ce n’est pas de la fatalité, seulement un constat. Amer, certes. Mais la construction du métrage, nous proposant de voir le début « théorique » à la fin, permet de finir sur une note d’espoir.
Et c’est justement cette construction un peu anarchique, une caméra épousant l’état d’esprit des personnages (de l’agitation frénétique au calme contemplatif) qui permet de « créer une distance esthétique » entre les propos du réalisateur et les actes du film.
«Irréversible », faux film choc et vrai film d’auteur.
Publié le 16/11/2007 à 12:00 par houseofgeeks
Si Paul Verhoven peut se targuer de déchaîner les passions et arborer fièrement le surnom de "le hollandais violent", par sa gouaille, son érudition et son enthousiasme Yannick Dahan est son pendant cathodique !
Présentateur vedette de la déjà culte émission "Opération Frisson", il se démène pour nous faire découvrir des films marquants à plus d'un titre. Le plus remarquable chez lui, c'est sa totale intégrité. Il aime le cinéma, ça s'entend et ça se voit ! Pas de langue de bois ou discours consensuel ou promotionnel, quand un dvd propose une intractivité inexistante, des bonus à chier ou tout simplement quand le film est une purge sans nom (ou bouzasse intergalactique, dixit Yannick), il le dit et explose sur les murs ou sous ses pieds les dvd honnis !!
Mais définir Yannick à sa propension à s'énerver serait par trop réducteur car il sait se montrer lyrique, passionné et sincèrement touché quand un film ou un jeu l'a emballé.
A contrario, il peut se montrer d'une mauvaise foi intersidérale, comme nombre de geeks. Capable d'humilité, de reconnaître la prédominance d'un avis contraire au sien, Yannick Dahan est un putain de critique ciné qui a une vraie réflexion sur les genres abordés et un amour indéfectible du cinéma.
A découvrir de toute urgence donc sur le site de cinecinema qui rediffuse son émission chaque semaine ! Une aubaine pour ceux n'ayant pas le satellite.
Il est également possible de télécharger des anciennes "ope frisson" en allant faire un tour par ici : http://yannickdahan.oldiblog.com
Un critique de ciné officiant à la télé comme dans des magazines qui parle de cinoche avec passion et réflexion, ça se savoure sans modérations !
Et je m'excuse auprès de lui de ne pas en avoir parlé plus tôt, car franchement il mérite le détour.
Publié le 09/11/2007 à 12:00 par houseofgeeks
Attention, nous allons aborder un véritable film culte. Que dis-je, LE film culte par excellence !
Car cette expression largement galvaudée, puisque accolée à la moindre guimauve pétant tous les scores du box-office désignait avant tout des ovnis filmiques proprement hallucinant faisant la joie des spectateurs, des séances de minuit dans les glorieuses seventies.
C’est auréolé d’une aura sulfureuse que l’on entendait parler pour la première fois de « Eraserhead » de Lynch, de « Pink flamingos » de John Waters, « the Rocky horror picture show » ou des films de Jodorowski. Mais depuis qu’ils ont été récupérés et avalisés par une intelligentsia de festivals, ils ont quelque peu perdu de leur pouvoir transgressif. Non que je remette en cause les qualités de ces films demeurant à part mais c’est bien l’hypocrisie avec laquelle ces œuvres ont été institutionnalisées (après les avoir vilipendées des années durant) qui est affligeante.
Faut-il regretter que ces OFNIS soient accessibles au plus grand nombre ? Bien sûr que non. Au contraire même. Seulement elles n’ont plus ce pouvoir de fascination que leur rareté leur conférait.
Et quelle œuvre peut se targuer d’enflammer l’imagination de ceux n’ayant fait qu’en entendre parler, les contraignant à une fébrile attente d’une hypothétique édition dvd zone 2 digne de ce nom (car sans multizone ou payer un max pour une vieille VHS pratiquement introuvable, point de salut) ? Rien moins que le démentiel slasher de Robert Hiltzik, le bien nommé « Sleepaway camp » ou « Massacre au camp d’été » en français !!
Nota : même ceux qui ont déjà vu le film (moi par exemple) fantasment chaque soir au moment de se coucher sur un dvd à venir !
Et si dans le cochon tout est bon, dans le slasher il faut surtout retenir 4 dates.
1974 : « Black christmas » de Bob Clark qui définit le concept.
1977 : sortie du chef d’œuvre de Carpenter « Halloween » qui tout en le redéfinissant, donne au genre ses lettres de noblesses.
1980 : déboule « Friday the 13 th » soit « Vendredi 13 » en V.F de Sean S. Cunningham qui le pervertit en simplifiant et caricaturant les enjeux à outrance (ce qui est surtout le cas des nombreuses, et pour la plupart dispensables, suites)
1983 : « Sleepaway camp » ou le slasher ultime
Aller, on peut mettre une 5 ème date, l’année 1997 qui a vu poindre les fossoyeurs du genre comme « Scream » (bien que la séquence initiale soit à sauver) et surtout l’inéna(nar)rable « Souviens toi l’été dernier ».
Mais revenons à nos colons et voyons le pitch :
Deux enfants, Peter et Angela, font du bateau avec leur père sur un lac. Un hors bord perd le contrôle et vient les percuter de plein fouet.
8 ans plus tard. Angela vit désormais chez sa tante et son cousin Ricky. Tous les deux partent pour un camp de vacances. Toujours traumatisée par l'accident, Angela ne cause qu'à son cousin. Elle provoque l'énervement des autres filles car elle ne pratique aucune activité. Alors qu'elle risque de se faire violer par le cuisinier, son cousin Ricky arrive à temps. Peu de temps après, le cuisinier se fait assassiner alors qu'il préparait un bac d'eau bouillante. Angela devient le souffre-douleur des autres enfants du camp qui n'arrêtent pas de l'embêter, excepté Paul, un jeune garçon qui succombe à son charme. Bientôt, d'autres meurtres affreux se produisent dans le camp. Les victimes sont toujours des personnes qui ont ennuyé Angela peu de temps avant...
Ok, là vous vous dites : c’est du foutage de gueule ! C’est rien qu’un énième ersatz de « Vendredi 13 » ! Etc…
Je vous l’accorde, ça s’annonce mal. Pourtant c’est un véritable festival de meurtres plus imaginatifs et barbares les uns que les autres. Pas suffisant ? Bon alors, il y a un sous texte sur les difficultés inhérentes à l’adolescence et à fortiori après une enfance aussi traumatisante, sans parler du sous texte ouvertement homosexuel sous-tendant tout le métrage.
Cela n’en fait pas pour autant un chef d’œuvre ?
Ultime argument, la fin et surtout ce plan final sont aussi malsain que terrifiant. Et je pèse mes mots !
Attention séquence dite de « la madeleine de Proust » :
A l’époque j’ai découvert ce film sur la 6ème chaîne (pas encore dénommé M6, c’est dire si c’est pas récent !) en deuxième partie de soirée. C’était l’été 1987 ou 1988, peu importe, à quelques jours de partir en camp de vacances ! Alors âgé de 13 ou 14 ans j’étais parti pour voir un sous « Vendredi 13 » et donc passer une soirée tranquille et fun (ouais, déjà à cet âge j’avais une conception bien particulière d’une soirée réussie). Déjà passablement émoussé par la succession des meurtres et une tension allant crescendo, le twist final m’a littéralement pétrifié. J’ai dû rester une bonne minute la mâchoire pendante me répétant intérieurement « putain, mais c’est quoi ce film de malade !! ».
Rien mais alors absolument rien ne vous préparera à cette révélation finale. Vous avez beau être éduqués par des films tels que « 6ème sens », « incassable » ou « Saw », rien n’y fera.
Bon, à force d’insister sur ce final dès que vous verrez le film, vous allez passer votre temps à gamberger et peut être (sûrement même) trouverez-vous à quel niveau il se situe (eh, j’avais que 13 ans et j’étais sevré à Freddy et Jason, impossible de deviner !). Malgré tout, la sauvagerie qu’il induit vous marquera.
Je l’ai vu qu’une seule fois ce satané film et pourtant je ne peux en parler sans un frisson.
Voilà le genre de film que l’on prend en pleine gueule, qu’on met un petit moment à digérer et après lequel on remercie le réalisateur pour cette émotion intense !
Un pur moment de bonheur.